1. D’un constat général…
Parce qu’elles sont le lieu de prises de décisions mais aussi d’élaboration de réflexions ou d’actions, les discussions collectives recouvrent des enjeux de pouvoir qui se manifestent de manière plus ou moins explicites. La forme adoptée par l’intervenant est une manière de s’inscrire dans des rapports de pouvoir, et ceci de plusieurs manières :
- par le moment choisi. En effet, ce qu’on retrouve le plus couramment, c’est le fait de couper la parole, ce qui peut être perçu comme un accident, mais qui bien souvent révèle la volonté (consciente ou non) d’imposer sa parole. Par ailleurs, intervenir systématiquement après d’autres interventions peut aussi être une manière d’avoir le mot de la fin, de ramener les choses à soi ou à ses idées
- par le ton. Ainsi le fait de parler fort est une manière de capter l’attention des autres, mais aussi parfois de s’imposer par la force. De même, en général plus le ton adopté est affirmatif, plus les idées énoncées vont apparaître comme des vérités et laisser peu de place à la remise en question.
Dans notre société patriarcale, ces rapports de pouvoir sont très souvent genrés. Ainsi les hommes ont souvent une place prédominante alors que les femmes sont en retrait. Cet état de fait n’est pas lié à une quelconque nature qui ferait des hommes des êtres plus motivés par la réflexion collective, plus à l’aise en public, ou des femmes des personnes moins militantes, plus timides… Il s’agit bien d’une construction sociale qui conditionne les individus à adopter des comportements normés.
2. Vers des propositions concrètes pour faciliter la participation de tous
- Chercher à promouvoir le collectif et non l’individu :
- Si possible, se disposer en cercle, pour favoriser les échanges, un partage des responsabilités et voir le groupe comme un ensemble cohérent
- Dans un groupe, la première étape est de le « sécuriser ». Pour cela, il est indispensable d’établir des règles de fonctionnement et de bien les respecter
- Adressons-nous à toute la salle, et non à une personne en particulier = lorsque quelqu’un parle, il s’adresse au groupe. Il est donc préférable que les individus ne s’interpellent pas directement, afin de renforcer le collectif et réduire les tensions.
- Réduire le risque de monopolisation de la parole :
- L’utilisation d’une multi-liste * de prises de parole permet l’expression d’un plus grand nombre en donnant la parole à celui sur la liste qui « n’a pas encore parlé », avant la liste de ceux ayant « déjà parlé »
- Limiter la durée des interventions : temps à moduler selon le nombre de participants et le temps disponible (entre 3 et 5 minutes par exemple). Cela permet d’aller à l’essentiel et de limiter les écarts…
- Pratiquer un tour de parole (notamment sur des sujets cruciaux) permet d’organiser le débat
- Adopter une répartition des rôles* permettant d’appliquer et de contrôler les prises de parole
- Favoriser les organisations permettant une parole de tous. Imposer un « tour de table » de tout le collectif plutôt que demander « qui veut la parole ? » incite à la prise de parole qui permet plus d’engagement de tout le collectif.

La multi-liste à plusieurs colonnes : comment cela fonctionne ?
- Dans la 1ère colonne, on inscrit les premiers tours de parole de chacun. Quand un participant sollicite une 2nde fois la parole, on l’inscrit dans la colonne suivante, et pour la 3ème demande dans une 3ème colonne…
- Tant que toutes les demandes d’une colonne (la 1ère, puis la 2nde…) ne sont pas passées, on reste sur cette colonne. Puis on passe à la suivante…
Il faut donc veiller, lors d’une demande d’intervention, à mettre le prénom dans la bonne colonne pour garantir la répartition de la parole la plus partagée.
La répartition des rôles : lesquels, comment ?
Les rôles sont proposés au début de chaque réunion (ou si c’est possible en fin de réunion pour la suivante, afin de laisser le temps aux anciens de donner quelques conseils aux suivants, ceci afin de faciliter les rotations).
Facilitateur / Animateur :
➥ Organise et relance les débats ; essaie de faire des interventions courtes ; évite de toujours donner son avis après les autres ; veille au bon déroulement de la séance.
Distributeur de parole :
➥ Distribue la parole aux participants”
Secrétaire :
➥ Chargé du compte rendu écrit de la réunion ; écrit de manière visible les suggestions, les inquiétudes, les décisions prises. Rappeler les décisions en fin de débat permet d’éviter les malentendus.
Gardien du temps :
➥ Fait respecter le temps de discussion convenu ; prévient de l’imminence de la fin de la réunion pour permettre la lecture des prises de décisions, la rédaction de l’ordre du jour de la prochaine réunion…
Sources :
Brochure collective « Débat sur les débats », sur le site infokiosques.net :
https://infokiosques.net/spip.php?article87
Micropolitiques des groupes – Pour une écologie des pratiques collectives”, D. Vercauteren
http://micropolitiques.collectifs.net/
« Susciter la participation » et « Education populaire et Territoires en Transition », par la Scop du Pavé
http://www.scoplepave.org/
